U.S.A. [2016] – Animation, action, comédie, aventure – Date de sortie : 17/02/2016 – Durée : 01h48
Avec les voix de : Ginnifer Goodwin, Jason Bateman, Idris Elba, J. K. Simmons
Résumé : Zootopia est une ville qui ne ressemble à aucune autre : seuls les animaux y habitent ! On y trouve des quartiers résidentiels élégants comme le très chic Sahara Square, et d’autres moins hospitaliers comme le glacial Tundratown. Dans cette incroyable métropole, chaque espèce animale cohabite avec les autres. Qu’on soit un immense éléphant ou une minuscule souris, tout le monde a sa place à Zootopia !Lorsque Judy Hopps fait son entrée dans la police, elle découvre qu’il est bien difficile de s’imposer chez les gros durs en uniforme, surtout quand on est une adorable lapine. Bien décidée à faire ses preuves, Judy s’attaque à une épineuse affaire, même si cela l’oblige à faire équipe avec Nick Wilde, un renard à la langue bien pendue et véritable virtuose de l’arnaque.
AVIS: Passionnante et étonnante, cette production Walt Disney aux allures de Buddy movies offre un véritable souffle à la firme américaine et à ses idéaux beaucoup trop traditionnels et familiales pour moi, allant jusqu’à presque abandonner leur vision manichéenne du monde. Rien à redire là-dessus, Zootopie, dans la représentation qu’elle fait de la société, est beaucoup plus ‘adultes’ que ces dernières productions en date, choisissant un décor urbain, rurale et contemporain, et non un décor magique ou de fantasy pur pour raconter une histoire.
Pourtant, quand le générique tombe, quelques défauts m’ont un peu contrarié. Je n’arrête pas de repenser qu’on voit un peu trop les zootopiens se servir de leur Iphone et de quelques unes de leur application comme si c’était le truc le plus cool du monde, effet comique qui n’a eu aucun effet sur moi : de mémoire, j’ai même très peu ri ou souri. Alors que les scénaristes pondent une critique assez juste et sérieuse sur les préjugés sociaux, la peur de l’autre, les rapports de classe et l’influence des médias, la technologie est quant à elle un mimétisme générateur de gags qui ne m’a paru à aucun moment pertinent dans la description qu’ils font du monde.
Ce n’est pas le sujet, certes, les scénaristes font bien ce qu’ils veulent d’autant plus que l’histoire fonctionne bien, mais le fait que ces gags reviennent continuellement sans véritable raison m’ont un peu gâchés le spectacle. [SPOIL] Un peu comme ce final avec Nick Wilde qui devient flic (aucune surprise !) et la gazelle Shakira qui clôt assez mal le récit et qui est sans aucun doute le plus gros point faible du film. Cette scène musicale a tendance à balayer d’un revers de main le contenu morale de l’histoire en plus de ne pas du tout se justifier au niveau de l’intrigue.[FIN DE SPOIL]
Je sais bien qu’on est dans un Walt Disney mais j’ai vraiment trouvé cela assez inapproprié et beaucoup trop conventionnel pour un film d’animation qui l’est beaucoup moins dans son discours : je crois que j’aurais aimé voir une autre fin moins axée sur le happy ending traditionnel et plus en phase avec les enjeux développés.
Mes arguments relèvent plus de la gêne que du reproche mais je dois souligner que les gags m’ont paru vraiment infantiles (du parc nudiste aux fonctionnaires paresseux, scène pseudo culte qui m’avait rebuté à la découverte de la bande annonce) et avaient tendance à altérer le suspense du récit. [SPOIL] Et j’ai trouvé un peu trop facile et prévisible que Nick Wilde entre dans la police. Avec son passé de voyou et son caractère indépendant, ça aurait été beaucoup plus fin et plus cohérent s’il était devenu détective privé. Ou alors le voir embrasser une toute autre nouvelle carrière. On sent bien que les auteurs ont voulu aborder le rôle du déterminisme social – qui concerne nos deux protagonistes – qu’ils dénoncent avec justesse mais je ne trouve pas que cette voie dans la police soit en phase avec l’histoire personnelle du personnage [FIN DE SPOIL].
Si je chipote un peu sur ces défauts d’écriture c’est plus pour souligner ma déception toute relative car les thématiques modernes et le fond subtil du scénario m’a, lui, vraiment séduit et enthousiasmé. Zootopieest donc un spectacle familial réjouissant et bourré de qualité – il est d’une grande tenue visuelle même s’il ne révolutionne rien, le message est plutôt intelligent et bien amené et il faudra donc faire fi de l’insupportable chanson de Shakira pour apprécier cette production qui a tout de même du mal à s’émanciper de ses propres codes et de certains stéréotypes qui peuvent parfois desservir des propos qu’ils prétendent dénoncer.
S’il m’est donc difficile de faire totalement abstraction des gimmicks inhérents à la firme américaine, j’ai passé en soi un très bon moment avec cette intrigue policière plutôt bien ficelée, vraiment bien rythmée et très souvent référencée qui parlera d’ailleurs plus aux adultes qu’aux enfants.
U.S.A. [2015] – Aventure, western, thriller – Date de sortie : 24/02/2016 – Durée : 02h36
Avec : Leonardo DiCaprio, Tom Hardy, Domhnall Gleeson, Will Poulter
Résumé : Dans une Amérique profondément sauvage, Hugh Glass, un trappeur, est attaqué par un ours et grièvement blessé. Abandonné par ses équipiers, il est laissé pour mort. Mais Glass refuse de mourir. Seul, armé de sa volonté et porté par l’amour qu’il voue à sa femme et à leur fils, Glass entreprend un voyage de plus de 300 km dans un environnement hostile, sur la piste de l’homme qui l’a trahi.
Un an après avoir impressionné le monde entier avec Birdmanet ses vertigineux (mais faux) plan-séquences, Alejandro G. Inarittu nous revient avec une histoire et un décor toujours liés à l’Amérique et son héritage cinématographique. Après avoir arpenté les coulisses d’un théâtre de Broadway, le cinéaste mexicain aventure cette fois-ci sa caméra dans l’ouest sauvage pour nous immerger dans une nature mythologique et tellurique avec une esthétique éblouissante qui n’est pas sans rappeler les fulgurances visuelles de son avant dernière oeuvre.
Si les plan-séquences ont une place prépondérante dans ses choix de mise en scène, c’est davantage la grande focale anamorphosée et le travail sur la lumière qui donne à The revenant toute sa superbe. Le directeur de la photographie Emmanuel Lubezki, dont le génie n’est plus à prouver, n’en est pas à son premier coup de maître car on a pu contempler et s’émerveiller de son talent dans les films de Terrence Malick – Le nouveau monde (2005) et Tree of life (2001), et Alfonso Cuaron sur la plupart de ses oeuvres de La petite princesse (1995) à Gravity (2013), en passant par Y tu mama tambien (2001) et Les fils de l’homme (2006).
Visuellement, ce western crépusculaire fera date dans l’histoire du cinéma. Rarement une nature m’aura paru autant vibrante et vivante que sous les yeux d’Inarittu et Lubezki ! Ces majestueux paysages hivernaux qui s’étendent à l’infini nous paraissent tour à tour sublimes et oppressants et s’imposent avec un tel impact à notre esprit qu’on est véritablement happé par la force et la beauté des images. Comme le trappeur Hugh Glass, nous évoluons nous aussi dans cette nature froide, sauvage, inhospitalière et enneigée ! Magnifiée par des tons gris et bleutés, enveloppée dans des atmosphères brumeuses et spectrales, elle est d’ailleurs un personnage à part entière si bien que les forces chaotiques et primitives inhérentes à cette dernière et magistralement restituées par Inàrittu génèrent des climax absolument saisissants.
Pour s’en convaincre, il suffit de voir comment le cinéaste illustre cette violence dans la toute première scène de combat. A travers un plan séquence fabuleux tourné dans les sous bois d’une forêt marécageuse, sa caméra mouvante passe sans arrêt du point de vue indien et américain ou les corps tombent et se déchiquettent à tour de rôle sous les flèches, les balles des armes à feux et les coups de masses. Cette prose visuelle mortifère et barbare ou l’humanité, dans ses valeurs et ses affects, est quasiment inexistante, résonnera pendant les deux heures quarante de film ! Ce qui n’empêchera pas pour autant les auteurs d’aborder l’imagerie mystique et religieuse à quelques reprises.
A la croisée du film d’aventure, du revenge movie et du survival, The revenant rappelle aussi tout un pan du cinéma spectaculaire qui vise à reproduire la grandeur et la beauté du monde sur grand écran, comme ont pu le faire par le passé Murnau, Cecil B. Demille, Victor Fleming ou David Lean dans l’âge d’or du cinéma classique, lorgnant du côté des russes Tarkovski ou Klimov (dont l’intensité des scènes m’ont beaucoup évoqué son chef d’oeuvre Requiem pour un massacre (1985)) pour la puissance de ses images qui semblent parfois déborder du cadre.
Mais qu’en est il au juste du fond et du scénario de ce film ?? Je dois bien avouer qu’environ à la moitié du film je commençais un peu à m’ennuyer car les enjeux, aussi simples et crédibles soient il, patinent et s’éternisent au point de n’avoir eu plus beaucoup d’intérêt pour la croisade vengeresse de Hugh Glass. The revenant fini presque par lasser par l’aspect démonstratif de sa mise en scène et la répétition de certains événements qui rallongent et alourdissent une histoire qui aurait assurément mérité d’être plus courte.
Si un flashback nous explique les motivations et les tourments d’Hugh Glass et de son fils, certaines hallucinations viennent parasiter le récit qui ajoutent un mysticisme et une spiritualité qui, eux, peinent à convaincre. A vouloir manger à tous les râteliers, The revenant prêche par son orgueil à vouloir nous éblouir à chaque instant, préférant ainsi nous asphyxier de sa grandeur et de sa prouesse technique sans parvenir à insuffler – sur la longueur totale du film – une âme à cette nature transfigurée.
Dans son dispositif, le film se veut à la fois intimiste et épique. Mais l’absence de tension psychologique et mon désintérêt croissant pour la proposition de cinéma du cinéaste retentissent avec plus d’intensité quand je constate que seules l’intéressent les successions de séquences spectaculaires alignant les moments de bravoure et les exploits surhumains. Je ne serais même plus du tout étonné par le manque de souffle – avec toute la subjectivité que cela implique – de The revenant dans le dernier tiers quand je compris alors ce que néglige le cinéaste et qui me semble primordial et essentiel : le montage. C’est cela même qui donne du rythme et de la respiration à une oeuvre et l’obsession qu’il a du plan long, du plan séquence et de l’esthétique de ses plans rendent sa démarche, à mes yeux, caduc, gratuite et donc voué à l’échec.
Avec le recul, je me souviens avoir eu davantage des sensations de jeux vidéos que des sensations cinématographiques. Mais le plus choquant à mes yeux ce sont les ressources inépuisables et la foi inébranlable d’Hugh que rien n’arrête. C’est bien simple, plus il tombe, moins il craint la douleur … Le corps du héros sera donc maintenu en vie exclusivement par sa volonté viscérale de retrouver l’assassin de son fils, à savoir John Fitzgerald interprété par Tom Hardy.
Bravant la mort comme aucun être humain ne pourrait le faire, Hugh Glass outrepasse tellement ses capacités physiques qu’il devient difficile de croire à une telle résistance quelle que soit ses motivations et aussi profondes soient elles. Pourquoi est ce un gros problème ? Parce que c’est le discours et le nerf du film ! En plus de survivre aux attaques dévastatrices d’un ours – assurément la scène la plus sidérante et intense du film – on le verra se sortir quasiment indemne d’une chute tellement énorme (je parle de plusieurs dizaine de mètres !!) qu’elle m’a coupé l’envie de voir le héros réussir sa quête.
La mise en scène, qui fini par n’exister et ne briller que pour elle même, finit par lénifier autant le spectateur que la soif de vengeance d’Hugh qui avance tel un super héros vers son objectif final. Les acteurs ne m’ont d’ailleurs pas paru extraordinaire. DiCaprio, sans être mauvais, joue sans trop de génie son personnage en gesticulant de douleur une bonne partie du film. Quant à Tom Hardy, on peut dire qu’il vole la vedette au roi Léo qui, décidément, ne m’a jamais vraiment convaincu par ses performances contrairement à Hardy qui, lui, m’impressionne de plus en plus. Et cerise sur le gâteau, je n’ai pas aimé la fin …
[SPOIL] Comme on s’en doutait aisément, il affronte son ennemi dans un duel endiablé et, comme toute personne qui recherche à la fois la rédemption et la paix intérieur, ne l’achèvera pas de ses propres mains, préférant le laisser aux indiens qui justement passaient par là et avec qui John a fait une mauvaise affaire précédemment dans l’histoire : ridicule. Juste avant que tombe le générique, la femme d’Hugh apparaît alors de nouveau sous une forme angélique et le regarde paisiblement comme pour approuver sa victoire spirituelle et sa soudaine félicité.
Personnellement, si j’avais été le scénariste, non seulement je lui aurais fait occire son ennemi, mais en plus, je ne l’aurais pas fait survivre à ses blessures. Après avoir survécu à l’enfer et à la dureté de la nature et de sa faune, l’ironie et le tragique de sa quête obsessionnelle aurait été beaucoup plus en phase avec la démarche artistique d’Inarittu s’il avait trouvé la mort. Quitte à faire de la nature un personnage – c’est en tout cas mon sentiment vu la place qu’elle occupe dans l’espace du cadre, autant lui donner le premier rôle et en faire le tombeau du héros car c’est bien elle qui est mis en valeur du début à la fin et non Hugh Glass ! N’étant pas en phase avec tous les aspects artistiques et techniques de The revenant, je ne peux que bouder le film malgré la radicalité et le jusqu’auboutisme de sa mise en scène.[FIN DE SPOIL]
Le parcours mental et physique du protagoniste perd tellement de sa substance à mesure que l’intrigue avance que la réalisation m’est apparu alors comme racoleuse et complètement vaine dans la contextualisation de son scénario. Seul l’intéresse la dimension mythologique et symbolique de son récit au point de répéter toutes ses figures iconographiques qui vont de la résurrection, du chemin de croix, la purification par l’eau ou encore à la position foetale dans le corps éviscéré de son cheval, sans qu’elles s’inscrivent organiquement dans une logique dramatique.
Alors qu’elle nous stimulait et nous émerveillait dans un premier temps, la mise en scène se transforme en poudre aux yeux dans sa dernière partie, aussi virtuose soit elle. C’est tout de même assez triste qu’Inàrittu se soit laissé séduire à ce point par les possibilités techniques pour nous en mettre plein la vue en négligeant à ce point son scénario ! Si Birdman, au delà de sa maestria, fonctionnait c’est parce qu’il y avait une vraie histoire aux enjeux clairs et évolutifs ainsi qu’une multitude de personnages interprétés par des acteurs fabuleux qui étaient vecteur d’émotion.
The revenantme semble être l’exercice de style de trop ! S’il est plutôt cohérent dans sa filmographie dans son maniérisme formelle et son rapport extrême au corps qui le rapproche de Biutiful(2010), le cinéaste est sur une pente glissante car j’ai vraiment le sentiment qu’il a fait ce film pour davantage séduire le tout Hollywood – qui l’avait consacré l’année dernière avec Birdman– et en s’oubliant lui même dans cette histoire qui, je trouve, s’inscrit dans une tradition beaucoup trop américaine et l’éloigne encore plus de ses racines mexicaines.
Les Désastreuses Aventures Des Orphelins Baudelaire (Lemony Snicket’s A Series of Unfortunate Events – 2004) de Brad Silberling
/ 7
Origine : U.S.A., Allemagne (2004) – Genre : Aventure, comédie, drame, fantasy
Avec : Jim Carrey, Emily Browning, Liam Aiken, Meryl Streep
Résumé : La saga raconte les désastreuses aventures des Orphelins Baudelaire. Ils sont trois : Violette, une fille de 14 ans à l’intelligence scientifique, Klaus, un garçon de 12 ans qui lit sans cesse et Prunille, une petite fille qui mord tout ce qui passe à portée de dents. Ils ont été élevés par des parents extrêmement gentils qui disparaissent dans un horrible incendie. Désormais orphelins, à la tête d’une immense fortune dont ils ne pourront jouir qu’à la majorité de Violette, les trois enfants sont placés chez divers membres de leur famille. L’homme qui les place est Mr Poe, un banquier un peu terne mais bien intentionné, exécuteur testamentaire des parents Baudelaire. Malheureusement, la richesse des enfants a attiré l’attention du cupide comte Olaf, un parent éloigné, acteur et maître du déguisement.
AVIS: Autant avouer que j’ai trouvé cette production Dreamworks particulièrement réussit alors qu’ordinairement, les productions familiales de la firme ne me sont jamais apparu comme des oeuvres originales et ambitieuses. Sorte d’Harry Potter dans les thématiques ou ce n’est pas la magie qui sert aux adolescents de se sortir des pires situations sans arrêt provoquées par le terrible Comte Olaf interprété par à un Jim Carrey en roue libre, ils doivent en effet se servir de l’art de la débrouille et de leur savoir technique et intellectuel pour échapper aux pièges tendus par le Comte obsédé par l’héritage familiale des enfants.
Visuellement, le film a une sacrée patine et offre quelques scènes assez osées et troublantes par moment, notamment avec la gamine d’à peine un an avec son franc parler et son pouvoir mordant (celle avec le serpent par exemple) : j’avais un peu l’impression de voir du Ken Russell dans l’esthétique de certains plans et dans la théâtralité de certaines séquences.
Même s’il est conventionnel dans son final et très morale sur les valeurs fraternelles, j’ai trouvé l’histoire plutôt sombre, lugubre et angoissante pour un film familiale ou des enfants sont confrontés à un oncle persécuteur, obstiné et envahissant qui passe son temps à les pourchasser et finira toujours par les retrouver quel que soit l’endroit ou ils essayent de se cacher. Le film reste d’ailleurs très cohérent et juste dans ses ruptures de ton, passant de la comédie pure au drame un peu plus intense et soutenu avec une aisance naturelle : je n’ai pas lu les livres mais l’adaptation cinématographique des trois premiers opus des Désastreuses Aventures Des Orphelins Baudelaire ne possèdent aucun temps mort et aucun superflu dans le scénario.
Les trois enfants sont d’ailleurs un choix parfait tant ils vont bien ensemble en plus d’être bien dirigés : j’ai même eu du mal à reconnaître tout de suite la toute jeune Emily Browning (Sucker Punch, Les intrus, Sleeping Beauty, etc) et ne savait pas qu’elle avait commencée le cinéma si tôt. A souligner aussi à quel point le générique de fin est d’une grande beauté graphique : les planches gothiques et poétiques illustrant une poursuite infernale qui n’en fini pas m’ont scotché jusqu’à la dernière image tant les créateurs se sont lâchés ! J’ai même pensé à du Pixar au niveau de la qualité et des idées !
Bref, après Dragons, dans le registre des films familiaux, c’est le seul film Dreamworks qui m’a fait aussi forte impression avec cette écriture un peu plus adulte que ses autres productions, surtout dans la manière de jouer avec les mots et les tournures de phrases : sans doute que les livres originaux doivent en regorger tant leur utilisation est présente et récurrente dans le film, ce qui donne très envie de les lire.
U.S.A. – Aventure, fantasy, comédie (01h51) – Date de sortie : 21/10/2015
Avec : Levi Miller (II), Hugh Jackman, Rooney Mara, Garrett Hedlund
Résumé : Proposant un nouveau regard sur l’origine des personnages légendaires créés par J.M. Barrie, le film s’attache à l’histoire d’un orphelin enlevé au Pays Imaginaire. Là-bas, il vivra une aventure palpitante et bravera maints dangers, tout en découvrant son destin : devenir le héros connu dans le monde entier sous le nom de Peter Pan.
AVIS: Ni complètement raté, ni complètement réussi, Pann’est hélas rien d’autre qu’une histoire extra-banale dans un univers extraordinaire. Mettant de coté ce gros défaut, le film est plutôt bien rythmé : je dois bien avouer qu’on s’ennuie assez peu. Mais dans le genre recyclage de vieilles formules et cross-over d’univers cinématographiques, on se tire les cheveux toutes les dix minutes à la vision du spectacle sans originalité qui défile sous nos yeux. Il est quand même difficile d’effacer cette (très grosse) impression de revoir en filigrane Star Wars, Avatar, Indiana Jonesou encore les Harry Potter tant dans la mécanique de récit, l’imaginaire, les archétypes que les facilités de scénario lié au fantastique concernant le dernier susnommé : exemple, la mémoire de l’eau qui permet au héros de découvrir une anecdote liée à son passé. C’est bien joli mais ça sert à rien !
Toute cette panoplie visuelle numérique déployée sous nos yeux pour qu’au final aucune scène ne reste vraiment dans les mémoires, j’en reste perplexe et frustré, même si quelques scènes (les pirates pêchant les orphelins, l’évasion de la prison de Barbe-noire, le combat sur les trampolines) peuvent un temps soit peu éveillés notre attention, comme le bestiaire et autres créatures fantastiques que les héros croiseront. Heureusement que visuellement Joe Wright (Reviens-moi, Anna Karenine, Le soliste, Hanna) agence de très beau plan et crée un certain vertige sur les scènes d’actions aériennes, sinon le film m’aurait paru vain et long pour ne pas utiliser d’adjectif désagréable.
Parfois, il y a quelques bonnes idées récurrentes comme le ‘retour du bâton’ dans les scènes de combats (l’arme de Tiger Lili, la poulie du navire), mais ce n’est même pas exploité à fond. Quitte à faire dans l’extravagant et le second degré – que le film assume plutôt bien, je pense que les créateurs auraient du davantage se lâcher et proposer davantage de folie. Il manque ce petit souffle alors que par instant, on sent une petite flamme animée le spectacle mais les aventures rocambolesques des héros n’embrasent jamais l’écran ! Et je suis vraiment mitigé sur la présence de Rooney Mara en princesse guerrière indienne. Je n’ai pas cru deux secondes à son personnage et je pense qu’une autre actrice aurait été préférable, alors que d’ordinaire j’aime bien l’actrice. Autant avouer que c’est un grosse erreur de casting !
Concernant l’histoire, il est plutôt intéressant de parler de la jeunesse de Captain Hook et de sa rencontre avec Peter Pan, mais on est tellement en terrain connu niveau intrigue qu’il est impossible de vraiment pénétrer dans le monde de Pan, malgré tout le soin apporté au Pays imaginaire qui a plutôt belle figure ainsi que le Londres victorien et dickensien qui ouvre le film. Toutes les révélations sur le passé d’orphelin de Peter Pan sont d’une telle banalité qu’on ne sera jamais surpris ou bouleversé par ce qu’il apprend sur sa mère et sa naissance.
Bref, Pana été conçu pour être un spectacle familial drôle et divertissant et c’est plutôt réussit si on fait fi qu’il ne révolutionne rien du tout et, comble du comble, manque tout simplement de nous faire rêver. Pour les cinéphiles aguerris et les spectateurs exigeants, il est tout de même difficile de ne pas faire la moue devant ce récit et cet imaginaire que l’on a vu un million de fois et qui se complaît beaucoup trop de sa facture classique, malgré quelques idées musicales saugrenues qui amusent tout juste : la reprise de Smell like teen spirit de Nirvana et Hey ho, let’s go ! des Ramones chantés par Barbe-noir et les enfants prisonniers du tyran.
U.S.A. – Aventure, comédie, science fiction – Date de sortie : 20/05/2015 – Durée : 02h10 – Titre original : TOMORROWLAND
Avec : Britt Robertson, George Clooney, Hugh Laurie, Raffey Cassidy
Résumé : Casey, une adolescente brillante et optimiste, douée d’une grande curiosité scientifique et Frank, un homme qui fut autrefois un jeune inventeur de génie avant de perdre ses illusions, s’embarquent pour une périlleuse mission. Leur but : découvrir les secrets d’un lieu mystérieux du nom de Tomorrowland, un endroit situé quelque part dans le temps et l’espace, qui ne semble exister que dans leur mémoire commune… Ce qu’ils y feront changera à jamais la face du monde… et leur propre destin !
A la poursuite de demain – Demain ne meurt jamais …
Cette production Disneyest un spectacle réjouissant super bien rythmé, drôle, émouvant, trépidant, bourré d’idées référentielles, tout cela animé par la patte singulière et personnelle de Brad Bird. On se délecte de la précision de la réalisation (surtout son sens de la spacialité !), de ses passions vibrantes et récurrentes qui traversent toutes ses oeuvres (Paris, les robots en tout genre !, etc), et de ses personnages très proches par moment de ses films d’animation dans leur comportement et leur dynamisme : il aime en effet les faire voltiger, booster leur capacité physique et les maltraiter, toujours avec compassion, dans des chutes impressionnantes. Et puis il est difficile de ne pas penser aussi aux productions Amblin (1) de la grande époque avec cette alliance entre personnages attachants, univers fantastique et efficacité du récit.
Britt Robertson, interprétant Casey Newton l’héroïne du film, est impliquée comme peu d’actrice de son âge peuvent l’être. Impressionnante autant dans les scènes de comédie que dans les scènes d’action, on la sent vraiment investit physiquement et émotionnellement dans son personnage : avec ses airs de jeune femme volontaire, battante et énergique, difficile de ne pas penser à Jennifer Lawrence. On la suit du début à la fin dans ses aventures aussi spectaculaires que rocambolesques, les effets spéciaux et les décors futuristes proposant un univers des plus fascinants.
Casey Newton a typiquement le profil et le rôle d’un agent spécial. On peut dire qu’elle fait clairement écho à la filmographie du cinéaste, puisque Brad Bird tourna le dernier Mission impossible en date, en plus de donner du piment à ce récit d’aventure sans trop de temps mort ou les héros doivent sans arrêt échapper à leur poursuivant. Casey sera, de plus, repérée pour ses talents par un recruteur tout à fait atypique : sans dévoiler la nature d’Athena, dont le nom évoque déjà beaucoup de chose, la candide Raffey Cassidy incarne un personnage tour à tour innocent, charmant, énigmatique et vraiment surpuissant. Elle montrera l’étendu de ses talents dans de magnifiques scènes d’actions à couper le souffle !
Le récit entretient vraiment un suspense palpitant au fur et à mesure que les révélations tombent. Rarement le talent de conteur de Brad Bird, qui signe aussi le scénario (2), ne se sera autant épanoui que dans ce blockbuster familiale. Pourtant habitué à l’animation, je savais qu’il était un metteur en scène live très doué puisqu’il était, comme je le disais plus haut, derrière la caméra de Mission Impossible : protocole fantôme (2011), visuellement époustouflant et profondément immersif. On peut dire qu’il applique avec encore plus d’inspiration et de génie son travail du cadre, du découpage et de la profondeur de champ, car il prend un malin plaisir à jouer sur une dualité ludique ou deux réalités se chevauchent dans un même plan au contact du fameux pin’s magique.
Sa maîtrise des effets spéciaux est toujours au service de l’histoire, son plaisir de mixer images réelles et images de synthèses est vraiment communicatif, et jamais il n’utilise ces dernières juste pour l’esbroufe : à ce titre, le passage de nos héros à Paris et l’utilisation qu’il fait de la tour Eiffel est un grand moment d’anthologie qui, en tant que français, ravie autant nos sens que notre imagination. Symboliquement, cette mise en image qui représente à la fois le monde des inventions, des sciences – monde rationnelle/image réelle – et celui de la science fiction, du futur – monde irrationnelle/image de synthèse, trouve une fluidité étonnante dans cet univers, tant il est parfois difficile de discerner ce qui réel et ce qui ne l’est pas.
Du début à la fin, le film nous embarque dans un voyage aussi haletant que surprenant, rythmé par des rencontres improbables et des personnages hauts en couleur. Ce grand 8 en 2D et sa tonalité parfois théâtralisé doivent sûrement au fait que le film est, à la base, une attraction du parc Disney. A la poursuite de demain parvient à restituer des émotions pures, intègres, et, fidèle à sa tradition, nous fait croire au Merveilleux dans le sens noble du terme.
De plus, on remarquera que la firme Disney fait des efforts pour moderniser ces thématiques. La famille et les bons sentiments sont moins au centre que dans ses autres productions, proposant une réflexion sur notre manière de vivre et une vision plus ou moins sombre que l’on peut se faire de l’avenir. Mais malgré un fond plutôt progressiste et en phase avec notre époque, je l’ai trouvé un peu démonstratif, limite barbant, dans sa morale sur la dernière partie. Ce sentiment de gène à même fini par grignoter – dans son final – l’euphorie ressentit pendant quasiment toute la durée du film.
Si les intentions sont louables, ces bavardages excessifs surlignent un discours qui s’imbriquait déjà parfaitement dans son intrigue et que l’on avait parfaitement saisit en tant que spectateur. En résumé, A la poursuite de demain est un beau et émouvant divertissement consommable sur place, offrant un lot enivrant de sensations fortes et d’images fabuleuses, mais qui hélas s’oublie très vite une fois sorti de la salle.
(1) – Société de production crée par Steven Spielberg, K. Kennedy et F. Marshall en 1981, à qui l’on doit Gremlins, L’aventure intérieure, Les goonies, Qui veut la peau de Roger Rabbit, les Retour vers le futur, etc
(2) – Co-écrit avec Damon Lindelof (Prometheus, Star Trek into darkness, World War Z, etc) et Jeff Jensen, qui n’avait encore rien écrit.
U.S.A., Australie – Action, aventure, science fiction – Date de sortie : 14/05/2015 – Durée : 02h00
Avec : Tom Hardy, Charlize Theron, Zoé Kravitz, Nicholas Hoult, Hugh Keays-Byrne
Résumé : Hanté par un lourd passé, Mad Max estime que le meilleur moyen de survivre est de rester seul. Cependant, il se retrouve embarqué par une bande qui parcourt la Désolation à bord d’un véhicule militaire piloté par l’Imperator Furiosa. Ils fuient la Citadelle où sévit le terrible Immortan Joe qui s’est fait voler un objet irremplaçable. Enragé, ce Seigneur de guerre envoie ses hommes pour traquer les rebelles impitoyablement …
J’en ai rêvé, George Miller l’a fait ! Je n’irai pas par quatre chemins : Mad Max Fury Road est le plus gros fist-fucking au cinéma Hollywoodien de ces quinze/vingt dernières années en termes de spectacle choc sans concession avec son lot de morts violentes en veux tu en voilà ! Aux chiottes les bons sentiments et la bonne morale, aux vestiaires les tourments narcissiques des super-héros, aux poubelles les spectacles commerciales et synthétiques de Cameron et autres boursouflures Nolaniennes ! Place à l’exaltation pure et dure, au cinéma comme je l’aime, donc attachez bien vos ceintures car la route de Max promet d’être explosive et vous n’en sortirez pas indemne !
Il n’est pas forcément évident de parler du pied monumental que j’ai pris en découvrant ce Mad Max version 2015 ! Cette symphonie visuelle et sonore à la fois bruyante et furieuse ne laisse aucun répit au spectateur de la première à la dernière minute. Et si j’ai émis quelques doutes concernant quelques effets spéciaux kitch (pour ne pas dire foireux !) incarnant les démons du passé de Max Rockatansky pendant le premier acte, j’ai vite oublié ce défaut quand arrive la tempête de sable d’une taille titanesque à l’imagerie sensationnelle, fabuleux climaxqui restera à n’en point douter dans les anales. Quand on dit que le cinéma vend du rêve, on peut dire que j’étais en train de vivre l’un des plus beaux rêves éveillés de toute ma vie de cinéphile !
Mad Max : Fury Road est d’abord et avant toute chose une ode au désordre et au chaos ! Aucun film d’action récent, aucun blockbuster n’avait atteint un tel degré de folie dans la mise en image d’un monde à l’agonie, ou la civilisation n’est plus qu’un lointain souvenir. Cette orgie cauchemardesque peuplée de corps mutilés, atrophiés, déformés ou peinturlurés sont le symbole vivant que tout est retourné à l’état sauvage, qu’aucune humanité et qu’aucun espoir telle qu’on les a connu est envisageable. Même s’il en est question parfois dans le peu de dialogue qu’il y a, il est tout bonnement impossible de croire qu’une voie de sortie est possible pour ces anti-héros pendant quasiment toute la durée du film.
Qu’ils s’agissent de la théâtralité des costumes et des maquillages, ou du design démentiel, baroque et improbable des bolides en tout genre – qui parfois prête à rire, cette surenchère extravagante trouve finalement une cohérence évidente dans ce décor de fin du monde, cette fournaise à ciel ouvert grouillant d’incessants vrombissements. Des voitures aux pics de métal à la voiture tank, des motos 4X4 aux imposants camions indestructibles, cette parade de véhicules de guerre hallucinants nourrit constamment l’imaginaire du film. Presque trente ans après sa trilogie, George Miller nous livre très certainement l’oeuvre la plus épique, flamboyante et dantesque de toute la saga.
Les tôles se heurtent et se froissent avec violence et fracas, les corps se tordent de douleur quand ils ne s’envolent pas dans les airs, les cris et les râles résonnent et se perdent dans le vent, la transpiration se mélange au sang, le cambouis se mélange à la poussière, les fumées de moteur se mélangent aux tempêtes de sables … Tout est avalé pour être recraché l’instant d’après dans un tourbillon d’images percutantes et dissonantes, la partition infernale défilant sous nos yeux étant pourtant complètement raccord à la dimension mythologique et la mise en scène attractive déployés par le cinéaste.
Mad Max : Road Fury est un opéra-live tout feu tout flamme embrasant chaque centimètre de pellicule et magnifié par un souffle endiablé et monstrueux qui n’est pas sans évoquer les morceaux les plus tonitruants de Led Zeppelin. En ressentit pur, il m’est difficile de ne pas penser aux martèlements les plus puissants, primitifs et frénétiques du batteur John Bonham accouplés aux guitares crasseuses, hurlantes et exaltantes de Jimmy Page, quand les scènes d’actions du film nous sautent sauvagement à la gueule sans prévenir et nous plaque violemment sur le dossier de notre chaise !
Ce sentiment que le monde n’est régit par aucune force positive, que le chaos nous secoue sans ménagement, que l’enfer est à nos portes voire juste à porté de bras … et de se dire que dans le fond, j’adore ça et j’en redemande ! Ces grandes étendues désertiques arides sans fin, ces imposantes montagnes rugueuses et désolantes, cette lumière incandescente et irradiante qui traverse les images : tout est là pour nous immerger dans un réel fantasmatique éblouissant, simulacre étourdissant que seul un art comme le cinéma peut en offrir.
Il n’y a pas de héros dans ce conte post-apocalyptique car le monde est complètement déshumanisé. Pas le temps de briller le temps d’une action ou de cadrer iconiquement les personnages car chacun d’entre eux peut mourir la minute qui suit ! L’intrigue n’est rien d’autre qu’une course poursuite de deux heures non-stop ou personne n’a le temps de se poser ou de respirer. Quand apparaissent pour la première fois à l’écran, tel un mirage miraculeux, les cinq épouses d’Immortan Joe – le tyran qui course la traîtresse Furiosa lui ayant volé ses ‘pondeuses sacrées‘, l’érotisme primaire de la scène sera brisé par des agissements inattendus, mais aussi broyé par l’urgence et le rythme déchaîné et hystérique du montage. Le travail minutieux sur ce dernier, ainsi que sur les cadrages, est réellement bluffant car le film parvient malgré tout à être lisible et compréhensible à l’oeil !
Les mauvaises langues diront que le scénario tient sur un ticket de métro, mais partant du principe que l’univers de Mad Max n’a plus d’ « histoire », dans sa définition première, George Miller articule tout son récit justement sur le fait qu’aucune histoire n’est possible pour les personnages. Chaque séquence est pensée comme un survival, la séquence d’après n’aura peut-être d’ailleurs jamais lieu. Les forces en action nous permettent absolument pas de penser à ce qu’il se passera la minute d’après ! Seule la survie compte, un point c’est tout ! Entre terme d’énergie cinétique, c’est bien le premier film occidental à concurrencer directement les oeuvres de Tsui Hark (Time and tide & The blade en tête) dans cette expérimentation formelle ou le flot d’images nous entraîne corps et âme sans jamais nous lâcher.
Calmons le jeu un instant, cessons ces termes élogieux et dithyrambiques le temps de souffler pour parler un peu de la conception et de la production. A la fin des années 90, le cinéaste australien George Miller commencera juste par dessiner croquis et storyboards (au nombre de 3500 au moment de la production en 2012 !) pour relancer la machine. Cette genèse sera juste constituée d’images qui lui traversent la tête et c’est en 2003 qu’un tournage produit par la Fox est envisagé en Australie. Mais le projet stagne et tout les trois ans, Miller réfléchi à la manière de poursuivre sa trilogie, pensant même à utiliser les images de synthèses et la 3D quand il réalisera Happy Feet en 2006.
Remportant un succès international avec ses sympathiques pingouins numériques, Warner Bros., qui produit le film d’animation, décide de laisser carte blanche au cinéaste pour qu’il remette sur rail ses bolides de l’enfer. En 2012, le tournage en Namibie est lancée : à cette période de l’année, le climat extrêmement pluvieux et agité de l’Australie ne permet pas de tourner dans le pays et la production se tournera alors vers ce pays de l’Afrique qui offre des décors naturels similaires. Si dans les années 2000 Mel Gibson, trop vieux pour reprendre le personnage de Max, a soufflé les noms de Robert Downey Jr et Heath Ledger pour le remplacer, c’est finalement Tom Hardy qui retiendra l’attention de Miller. (1)
Choix judicieux quand on sait qu’il a clairement le charisme et le physique pour jouer le personnage ; il suffit de se rappeler de ses compositions viscérales et troublantes dans Bronson (2008), Warrior(2011)ou The Dark Knight Rises (2012) pour se rendre compte qu’il a tout à fait le profil pour jouer un Max Rockatansky convaincant. Mais il faut se rendre à l’évidence : Mad Max n’est pas le protagoniste. En effet, Imperator Furiosa, interprétée magistralement par une Charlize Theron en totale osmose avec son personnage, vole la vedette et mène la danse en tentant coûte que coûte d’échapper aux griffes d’Immortan Joe. Mad Max : Fury Road, film féministe ? Il en a, en tout cas, les élans, malgré la noirceur et le nihilisme de l’univers.
Leur duo est d’ailleurs vraiment émouvant ; on s’attache vraiment à eux et leur relation évoque une âme qui scintille fébrilement dans un monde qui en est dépourvu. Si le casting n’avait pas pris soin de réunir deux aussi bons acteurs, le film aurait pu facilement tourner à vide et faire de cette démesure pyrotechnique et de cette mise en scène emphatique un simple exercice de style.
Mais non, ils assurent comme des diables dans leur rôle respectif, le reste des comédiens également, Nicholas Hoult étant sans aucun doute le plus méconnaissable et impressionnant des seconds rôles. Miller a aussi fait fort et réunissant un cercle très séduisant de magnifiques jeunes femmes dont la majeure partie est inconnue : leur beauté sensuelle et leur tenue virginale ajoutent, à n’en point douté, un charme tout à fait bienvenue et détonant au milieu de tout ce vacarme et de ces vociférations.
Je retiendrais finalement une seule et unique chose de Mad Max : Fury Road. Il est à la catharsis ce que le beau et le sublime sont à la philosophie et à l’art. Rarement un film m’aura autant saisit et fait vivre autant d’émotions diverses, passant de l’effroi au rire en un claquement de doigt, et offrant des visions somptueuses et phénoménales que je n’avais encore jamais vu. Toutes ses sentations fortes m’ont à la fois ébranlé, épuisé, et rempli de joie … c’est dit, j’y retourne demain !
Avec : Dwayne Johnson, Seann William Scott, Rosario Dawson, Christopher Walken
Résumé : Afin de régler une dette, Beck doit traverser la jungle amazonienne pour ramener Travis, le fils d’un riche propriétaire parti dans une chasse au trésor. Cependant après l’avoir retrouvé, le chasseur de primes va s’unir à lui pour combattre Hatcher, le gérant cruel et véreux d’une mine d’or. Les choses vont encore se compliquer lorsque les deux hommes vont tous deux s’éprendre de la belle Mariana.
AVIS: S’il est facile d’identifier les blockbusters et les bons films de genre US des années 80 et 90 par leur ton, leur univers, leur code et leur plastique bien à eux, j’ai toujours un peu de mal à visualiser et à trouver une identité à la décennie suivante. Les années 2000 sont certes traversées par les premières aventures des divers super-héros, de la première trilogie du Seigneur des anneaux, des Transformerset autres Fast and Furious, etc. Mais elles possèdent à mes yeux une multitude de facette ou l’art côtoie trop souvent le cochon, mais surtout ou le spectaculaire rime aussi très fréquemment avec ‘convention’, ‘scénario balisé’, et ‘recette réchauffée’. Mais laissons le temps au temps et revenons en à nos moutons.
Le cas Bienvenue dans la jungle, sortit en 2003, reste certainement l’une des plus belles réussites du genre, soit une sympathique bobine d’action décomplexée comme on n’en voit plus tellement aujourd’hui, parcouru ça et là du souffle et de la saveur typique des années 80 et 90 ! En réunissant tout plein d’ingrédients, le film parvient à se tirer du lot en mélangeant avec panache la comédie d’action, le récit d’aventure à l’ancienne et le buddy-movie avec un savoir faire tout à fait maîtrisé, glissant une subtilité évocatrice très bien pensée dès l’introduction.
En effet, voir Arnold Schwarzenegger himself croisé le chemin de Dwayne Johnson/The Rock avant qu’il pénètre la boîte de nuit est pertinent à souhait en plus d’être une idée de génie. Cette star du cinéma d’action d’hier lui jette un « havin’ fun ! (éclate toi !) » bien sentit comme pour lui passer le bâton du relais afin que ce dernier incarne à son tour le ‘corps surpuissant’ dans le cinéma d’action des années 2000. Clin d’oeil bien placé à cet instant du film qui nous plonge directement autant dans une dimension mythologique que dans le prolongement des oeuvres de James Cameron, Paul Verhoeven et John McTiernan qui ont bâti et intronisé le culte de l’autrichien le plus célèbre de la planète.
Quoi de plus éloquent que de marquer la fin d’une époque et d’en ouvrir une autre avec un acteur comme Dwayne Johnson qui, avouons le, est le seul ‘surhomme’ à pouvoir remplacer la star mondiale par sa morphologie quasi identique à la sienne. Car de ‘corps’ il en est question dans ce film de Peter Berg ! Il n’est pas anodin de voir celui de Dwayne Johnson malmené à ce point : de la chute interminable en pente à 70 ° dans la jungle sauvage, aux parties de flipper grandeur nature en trois dimensions avec des capoeristes mexicains, à sa capacité à encaisser et recevoir mille et uns dégâts de toutes sortes sans jamais faiblir, Peter Berg organise une belle esthétique du corps indestructible en n’oubliant jamais son histoire.
Concernant la comédie d’action, c’est peut être là que le film montre le plus ces limites. Les manières culottées, narcissiques et immatures de Travis/Sean William Scott envers son collègue Beck/Dwayne Johnson lasse bien plus vite à la re-vision que je ne m’y attendais. Si leur duo fonctionne plutôt bien, la partie comédie est assez laborieuse et trouve rarement de climax vraiment hilarant : si les scènes de pseudo-zoophilies avec les babouins font tout juste sourire (qui n’ont rien à faire au Brésil puisqu’ils sont africains !), c’est plus les nerfs que la drôlerie de la scène qui nous saisira quand ils tenteront de récidiver leur besoin libidineux quelques scènes plus tard.
Par contre, le récit d’aventure fonctionne du feu de dieu, même s’il est clairement classique et balisé à l’excès dans son déroulement. L’introduction présente à la fois magnifiquement Beck, le personnage principale, tout en offrant une belle scène d’action efficace et bien violente dans ladite boîte de nuit en annonçant tout de suite la couleur et les intentions du film. Son discours sur la méthode A, pacifique et diplomate, et B, beaucoup moins diplomate (vous m’avez compris !), pour marchander avec ces antagonistes présente à la fois la dualité du personnage tout en jouant avec le spectateur qui espère voir la méthode B exploser sur son écran. Ce gimmick ressortira plusieurs fois et amusera à chaque fois … car la méthode B sera au rendez-vous, pour notre plus grand plaisir, même si Beck, d’un premier abord non violent, essaye toujours d’appliquer la méthode A ! Sans trop de succès donc …
De plus, l’intrigue développe plutôt bien ces enjeux et les motivations de chaque personnage, tout en ayant un fond et une morale. Le méchant américain Hacher, impérial Christopher Walken – comme toujours j’ai envie de dire, exploite sans vergogne la population locale pour les faire travailler dans ses mines d’or : cette politique fait donc écho à une histoire réelle connue de tous ou le riche américain organise le travail à sa façon pour récolter la grosse partie d’une richesse qui ne lui appartient pas. S’il n’y a rien de réellement subversif, c’est toujours agréable de voir les productions US mettre comme méchant un blanc pratiquant le capitalisme sauvage sans aucun scrupule. Cela change en tout cas du méchant arabe, russe ou nord coréen que l’on a l’habitude de voir.
Mais voilà, les personnages principaux sont simples sans jamais être archétypaux et ils ont tous leur place dans la mécanique bien huilé du récit qui n’offre quasiment aucun temps mort. La narration n’est composée d’aucun surplus gênant pour faire du remplissage et les seconds rôles sont, miracle, toujours utilisés à bon escient. De nos jours, on ne trouve plus du tout ce genre de production qui ne mise que sur le spectaculaire au détriment du scénario. C’est donc tout à fait plaisant de redécouvrir ce divertissement intègre et authentique, sa facture étant bien supérieure en termes de qualité formelle et d’écriture par rapport aux blockbusters surpixelisés qu’on nous sert à la chaîne aujourd’hui.
Le découpage du film est d’ailleurs tout à fait respectable et trouve un parfait équilibre entre la dynamique d’un montage très cuté et la lisibilité des scènes d’actions : il en restitue une énergie diablement euphorisante. Et le film est plutôt généreux coté cascades impressionnantes en tout genre (1) – Dwayne Johnson exécutant lui même certaines d’entre elles – et scènes d’actions brute de décoffrage dans son final explosif.
On a parfois l’impression qu’une équipe de cascadeurs de Hong-kong s’est invitée le temps d’une scène de castagne (la rencontre entre les guérilleros mexicains en pleine jungle) tellement il en résulte cette efficacité fiévreuse et primaire dans ces chorégraphies précises, violentes et déchaînées. Remplie d’emphase et d’exubérance, on se délecte de cette surenchère aussi frénétique que jubilatoire, ces acrobaties martiales impressionnantes et virevoltantes s’harmonisant autour d’une étonnante ‘poésie des corps en mouvement’.
Dommage, cependant, que Beck choisisse la facilité dans l’ultime scène de fusillade. Détestant les armes à feu, il succombera finalement à la tentation afin de satisfaire ses bas instincts qui ravira, par contre, à n’en point douté le fan hard-core de films bad-ass. Personnellement, je continue de penser que ce n’était pas une bonne idée, car cela rendait le personnage profond et intéressant sur le fait qu’il utilise uniquement son ‘corps’ pour affronter ses ennemis, afin d’être raccord avec la thématique et l’esthétique du film que j’ai évoqué plus haut.
Rosario Dawson, seule femme dans ce monde 100 % masculin, est quant à elle divinement pure et exquise dans le rôle de Mariana, personnage plein de surprise et de ressource. Plutôt fan de l’actrice, j’ai toujours trouvé qu’il se dégageait quelque chose de primaire et charnelle de son aura, sans qu’elle en joue consciemment et tout en restant délicat et sobre dans son jeu : dieu que j’aime ce genre d’actrice ! De son physique plantureux et de cet enivrant mélange de sensualité douce et d’animalité refoulé, le cinéaste n’en abusera jamais dans des plans licencieux ou racoleurs. Jamais Peter Berg ne tentera de la soumettre à une image de bimbo lisse ou de faire valoir, son personnage étant au même niveau (voire plus intelligente et épaisse en termes de caractérisation quand on découvre quel rôle elle incarne !) que la gent masculine.
Bref, voilà typiquement le genre de film d’action que j’affectionne et qui, à mon grand regret, a complètement disparu des salles obscures ! Bienvenue dans la jungle est certainement le dernier film en date de cette tradition, de cette trempe et interprété par des stars ou le genre était à la fois porté par une vraie efficacité de la mise en scène, tout en développant un symbolisme et une mythologie, celle nous concernant étant la nature toute puissante du corps humain soumit à rude épreuve sans jamais faiblir et faillir face aux lois de la physique et de la gravité. Rien que ça !
Fini le temps béni ou il était possible d’allier le spectaculaire et l’efficacité narrative ? Fini le temps béni ou les codes du cinéma de genre brillaient autour d’une authentique proposition de cinéma, jusqu’à transgresser la nature même des blockbusters ? Morts et enterrés les Indiana Jones, Mad Max ou autre John McClane ? Bienvenue dans la jungle m’apparaît en tout cas comme un émouvant et magnifique chant du cygne d’un type de cinéma qui a totalement disparu du paysage cinématographique américain, mais éveillant en moi une puissante ivresse de nostalgie qui me comble de plaisir.